Étiquette : organisation du travail
Dialogue social ? Ou l’alternative syndicale face aux dérives patronales
Qu’est ce que le Dialogue dans le monde du travail ? Qu’est ce que le Social dans le monde du travail ?
Et pourquoi faut il des Syndicats et des Représentants du personnel – Indépendants – dans les entreprises ?
Parce que la base du service, donc la base du profit, c’est le salarié. Parce que les quêtes de profits effrénés, comme les spéculations qui y sont parfois liées, mettent le Salarié et la qualité de Service en danger.
Parce qu’un bon service client nécessite du personnel en nombre suffisant et des organisations de travail respectueuses, équitables et bien traitantes. Parce que tous ça, en plus du Droit, le syndicat et les IRP sont les garants.
À SUD et Solidaires nous n’adhérons pas aux procédés se faisant régulièrement appeler « dialogue social » dans le monde du travail. C’est pourquoi nous prenons des pincettes en employant une notion très galvaudée.
Pour nous il devrait avant tout s’agir d’un échange sincère et équitable permettant d’ajuster le travail et ses conditions, suivant la prise en compte plurielle d’Usagers et de Salariés (leur travail, les contextes, leurs points de vue, etc.) afin d’en dégager des améliorations ou des solutions.
Dans la pratique malheureusement, les employeurs se contentent trop souvent d’assener par ce biais leurs explications pour justifier un état de fait ou une politique d’entreprise, et en prétendant au final que les décisions sont le fruits de « concertations ».
Le Dialogue, l’Ecoute, et le Social, sont pourtant les seuls remparts à une généralisation des risques psychosociaux, dés lors qu’une entreprise ou ses représentants ne savent d’eux mêmes se montrer raisonnables face à leurs quêtes de profits.
Dans les établissements de santé, le travail de plus en plus souvent ne se résume plus que par des listes de tâches et de protocoles à n’en plus finir. L’humain, que ce soit côté salarié ou usager, a de plus en plus de mal à trouver sa place dans ce qui s’assimile à nos yeux à du travail à la chaine dispensé sur des personnes.
Les prises en charge, se voient ainsi rationalisées, suivant des critères trop quantifiés ou minutés et ou l’humanisation sous entendue en théorie et dans des arguments commerciaux ne sait plus trouver le temps de s’exprimer dans les pratiques quotidiennes.
En EHPAD ça donne souvent : 1 temps imparti pour 1 toilette, un nombre de douches hebdomadaire régulé, idem pour le nombre de protections quotidienne, à tel heure le soignant doit être ici pour tel tâche, à telle heure là bas pour telle autre tâche, etc.
L’ensemble de cette organisation, pensée de manière « optimale » (pour ne pas dire profitable) exclue, pour « bien fonctionner », que le soignant ai pu prendre du retard dans 1 toilette ou dans une des ses autres tâches et que cela puisse avoir des conséquences sur toute la chaine du travail quotidien.
Au milieu de l’application quotidienne de ses listes de tâches pourtant, le salarié est régulièrement confronté à des tas « d’imprévus » ordinaires. Ex: Une caca-strophe « imprévue » survenue entre deux horaires de changes… Face à un tel cas cas d’école, très courant, que faire ?
Suivre bêtement à la lettre les tâches assignées et donc les horaires de change, et qu’importe la personne souillée, ou les odeurs ?
Non, car cela reviendrait à être maltraitant pour un résident que l’on laisserait dans ses selles jusqu’à la prochaine heure de change.
Prodiguer le soin nécessaire au moment où le besoin survient ?
Oui, mais dans ce cas on se met en retard ( voire en faute ) vis à vis de la suite de notre chaine de travail.
Dans la pratique et selon les soignants, les deux réponses existent :
– dans le premier cas, cela est difficilement entendable pour les usagers, ce qui se comprend, et crée une source de tensions dans la mesure où il est difficile d’admettre que l’établissement ne réponde pas à un droit de l’usager aussi légitime.
– dans le deuxième cas, cela revient à consommer plus de protection que la dotation prévue et qui plus est rationnée (des soignants responsabilisés sur le matériel peuvent se voir reprocher un écoulement des stock plus rapide que prévu). Cela revient aussi à se mettre en retard dans le reste de la chaine du travail. Certain(e)s dans ce cas ne pourront pas prendre leur pause, avec le cercle d’épuisement bien connu qui s’en suit, tant sur le plan physique que psychique du fait du manque de considération hiérarchique quant à ces aspects de l’organisation.
Nous n’avons pris qu’un seul exemple mais la journée est jonchée d’aléas ordinaires. Les imprévus de toutes sortes, sont aussi multiples que quotidiens, et on remarque pourtant que les politiques d’entreprises n’en tire pas les conséquences qu’il faudrait pour autant ni n’en assument les conséquences, dans la mesure où les logiques de profitabilité ignorent ces imprévus dans les organisations du travail telles qu’appliquées dans bien des cas. Des logiques qui excluent bien souvent le recours aux créations de postes supplémentaires pour palier aux besoins.
En résumé, sinon l’augmentation subtiles des charges de travail, il n’existe pas de place dans la chaine de tâches des soignant(e)s, ni dans celles des non soignants d’ailleurs, pour répondre aux multitudes d’imprévus auxquels doit pourtant répondre le premier salarié venu : soins « hors planning », urgences, canalisation d’un résident désorienté, demandes d’accompagnements en dehors de certains temps prédéfinis, sollicitations de résidents, de familles, de libéraux ou de l’encadrement, etc.
La multiplication des charges de travail « imprévues » favorisent automatiquement des dysfonctionnements dans l’organisation des tâches prévues.
Parallèlement pourtant, l’attitude commerciale vis à vis du client, tendra souvent à vanter une disponibilité exemplaire, sinon sur mesure. On s’abstiendra alors d’expliquer à l’usager, dans le cas de tel ou tel imprévu, le pourquoi d’une attention ou d’un soin manquant. On ne dira pas que ça ne fait pas partie des tâches prévues, ni qu’il faut attendre l’horaire planifiée, encore moins qu’il faudrait plus de personnel. Mais en se disant compréhensif du problème de l’usager sans pour autant en régler les vraies causes, on en déchargera tacitement la responsabilité sur des salariés invités à agir dans l’urgence, et qui aux yeux de l’usager peuvent facilement être perçu comme attentistes.
On ne perçoit souvent pas les conséquences sur l’organisation travail chaque fois qu’un salarié répond à telle ou telle demande qui n’est pas dans sa feuille de route déjà très bien remplie.
Il faut savoir que les aides soignant(e)s au niveau national ont le taux le plus élevé, parmi tous les professionnels de la santé, de à l’insatisfaction des conditions de travail.
En maisons de retraite ou EHPAD, près de 30 % des AS signalent des troubles de santé mentale (dépression, anxiété, insomnie, burn-out).
Dans bien des EHPAD, le personnel soignant effectue 12h de présence quotidienne, les soignants passent le plus long de leur journée de travail debout, beaucoup touchent moins de 1200 euros à la fin du mois, très peu sont épargnés dans l’année par un arrêt travail des suites de leur travail, ni par les douleurs musculaires, sans parler d’autres troubles physiques ou psychiques. Enfin, une infirmière sur quatre et une aide-soignante sur trois part à la retraite avec un taux d’invalidité.
Tout cela n’est pas pris en compte dans la marche des entreprises qui regardent davantage leurs marges. Mais c’est pourtant bien connu des acteurs syndicaux qui refusent que des entreprises les confinent à un rôle de simple spectateur quand les autorités ne savent que faire germer des pactes placebos.
Tant que des décideurs ne seront plus responsables, pas plus raisonnables, pas plus respectueux du Droit, et que l’État continuera à le cautionner soit en fermant les yeux soit via des pactes ou des lois trop indulgentes pour les capitalistes, alors nous n’auront de cesse d’adapter nous aussi nos moyens de défense et d’action.
Les risques d’une « domestication » de syndicats, d’IRP, ou d’une neutralisation de leurs capacités d’agir par le patronat ou par l’État ne sauraient que mener qu’à plus de radicalisation.