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Prud’hommes : Korian pourrait être poursuivi pour travail clandestin en cas de suite au pénal

Un dossier a été porté cet été au tribunal des Prud’hommes concernant des salariés de l’Ehpad Résidence du Moulin de l’Isle de Trélissac en Dordogne. L’affaire peut illustrer des problématiques qui nous semblent récurrentes dans bien des EHPAD, cela touche aux questions de recrutement, de remplacement, de non qualification de soignants et d’irrégularité de contrat de travail. Tout ça nous l’avons plusieurs fois aborder sur ce blog ou lors de gréves. Après la 1er audience, lundi 1er septembre et dans des articles d’Hospimédia et du journal en ligne Sud Ouest, on découvre que pour le groupe Korian certaines pratiques seraient non seulement connues mais courantes dans le secteur privé lucratif, et même « tolérées » par les tutelles. Cela rejoint les statuts très courants de salariés non diplômés « faisant fonction de » (AS, IDE, etc.) et très souvent payés moins que s’il étaient diplômés. Bien entendu, nous jugeons l’ensemble de ces pratiques inacceptables parce qu’elles précarisent autant le salarié que la qualité du  soin, voire certaines professions.
Si ce sont les besoins et les difficultés de remplacement qui pour l’entreprise semblent « justifier » de telles pratiques il convient selon nous de repenser l’attractivité des postes à pourvoir ou remplacer (rémunérations, conditions de travail, etc.) plutôt de jeter la pierre à des CDD trop stricts dans le droit français (sic).
Par ailleurs, SUD n’a pas manqué de rappeler depuis plus d’un an qu’il existe dans le code du travail et la convention collective une mesure sensée encourager les prises de congés payés hors période de pointe pour éviter d’avoir à gérer trop d’absences en même temps : cela s’appelle le congés fractionné et « récompense » d’1, 2 ou 3 jours de congés supplémentaires le salarié qui accepte de prendre ses congés sur une période moins prisée.
La possibilité existe donc, elle est facile à appliquer, sauf que dans la pratique des entreprises ne conçoivent pas d’octroyer plus de CP et ne recours au fractionnement du congés que dans le cas où le salariés renoncerait à son droit de jours supplémentaire… Ah, profitabilité quand tu nous tiens…Combien de salariés ou de clients auront pu constater par eux mêmes cet été en EHPAD ce qu’il en coûte à la qualité du service et aux conditions de travail lorsqu’il y a plus de vacataires que de titulaires sur le terrain ? Sans compter les absences non remplacées…d’après Hospimedia et Sud Ouest (« une affaire d’abus de CDD à l’Ehpad du Moulin de l’Isle ») :
4 anciens salariés de l’Ehpad de Trélissac sollicitent le conseil des Prud’Hommes de Perigueux avec pour certains 41 CDD sur un an. Une situation qui pour Korian, est propre au secteur d’activité et à ses difficultés de recrutement.

D’après Sud Ouest, les remplacés mentionnés sur les CDD sont bien souvent des personnes inscrites comme étant bien présentes sur le planning ces jours-là et les contrats sont visiblement libellés avec beaucoup de légèreté. Encore plus fort et toujours selon Sud Ouest ces employés devaient se déplacer chaque jour jusqu’à Trélissac pour savoir s’ils travaillaient ou pas et les contrats mentionnaient une clause d’exclusivité, c’est-à-dire qu’ils ne pouvaient travailler nulle part ailleurs entre leurs contrats pour compléter leurs revenus, ce qui est interdit et particulièrement abusif.

Porteur du dossier aux Prud’Hommes, Philippe Bonneau, a exposé lors de l’audience des pratiques « monstreuses » opérées au sein de l’Ehpad Résidence du Moulin de l’Isle de Trélissac (Dordogne), affilié au groupe Korian. Il s’agit de successions de CDD très courts, signés après prise de poste, d’absences de visite médicale, d’absences tenues de travail non fournies, ou encore des affiliations à des postes pour lesquels les employés ne sont pas qualifiés… Philippe Bonneau, s’inquiétant des répercussions sanitaires et éthiques de telles conditions de travail sur les résidents.

Ces employés dit-il « ne sont pas qualifiés pour faire les remplacements qu’ils faisaient. Ils n’avaient pas les diplômes d’État que requièrent les fonctions d’infirmière, d’aide soignant ou encore d’auxiliaire de vie sociale », Pour le syndicaliste celà caractérise un risque de maltraitance pour certains « actes typiquement infirmiers » effectués par du personnel non-qualifié.

Jusque-là limitée au civil, la procédure pourrait selon le syndicaliste,aller au pénal pour cause de délit grave. « Les quatre employés, au moins sur la période 2013, n’ont pas été déclarés, nous avons pu le vérifier, assure-t-il. S’il s’avère qu’ils ne sont pas inscrits au registre du personnel, Korian pourrait être poursuivi pour travail clandestin« , prévient Philippe Bonneau.

Une requalification des CDD en CDI est demandée avec ouverture des droits associés, ainsi que 12 à 15 000 € en cumul et 5 500€ de dommages et intérêts par personne.

Pour Korian qui a été contacté par Hospimedia, il y aurait des pratiques « tolérées »

S’il ne réfute pas le recours en grand nombre à des CDD, ni l’emploi de personnel non diplômé, certaines accusations sont « totalement fausses pour Adnan Boulard, repsonsable des relations sociales et juridiques de korian selon qui « Les employés sont tous déclarés et ont signé leur contrat dans la journée« . Quant aux embauches en questions, elles sont réalisées dans le cadre de remplacement d’absences.
Les reproches de faire appel à du personnel non diplômé, Adnan Boulard ne le comprend pas. « Les professionnels au sein du vivier de vacataires que nous avons constitué ne sont certes pas tous diplômés [pour les postes assignés], mais cela se pratique dans beaucoup d’établissements, parce que le secteur a de grandes difficultés à recruter. Cela fait d’ailleurs l’objet de tolérance de la part des tutelles. » […]  « le secteur fait l’objet de recours aux Prud’Hommes accrus, du fait de son activité cyclique, mais également du fait de la réglementation très stricte des CDD en France« .

Les syndicalistes affirment et on le devine facilement, quand les quatre employés sont venus les voir, au printemps, ils étaient au bord de la dépression. D’où la nécessité de vraiment revoir certaines pratiques inacceptables qui existent dans le secteur.

Le verdict du conseil sera rendu le 10 novembre.

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