La famille est le premier maillon des aidants. C’est souvent elle qui, s’épuisant dans la prise en charge d’un parent dépendant, décide de le placer en EHPAD.
Dans la mesure où la famille d’une personne dépendante gère souvent les différentes obligations administratives et financières du résident cela fait souvent d’elle, aux yeux d’un établissement, le principal client et plus que ne l’est le résident bénéficiaire.
Ce client qui accepte des tarifs extrêmement onéreux avec des factures mensuelles entre 1500 et 8000€ par mois, selon l’établissement, les options et autres frais liés au séjour, est pourtant loin d’être roi.
Si son avis est parfois mieux écouté que celui du résident dépendant, la prise en compte de ses attentes se heurte malheureusement souvent à des réalités institutionnelles souvent loin des brochures commerciales et des slogans. En effet, beaucoup de familles jugent la qualité de service insuffisante, ou en tout cas en décalage, par rapport à leurs attentes et à ce qu’elles croyaient en arrivant.
Certaines râlent, d’autres se résignent et dans bien des cas, la famille qui a placé un proche qu’elle ne pouvait plus prendre en charge seule se retrouve à maintenir une certaine prise en charge pour compenser la partie du contrat que l’établissement n’assurerait pas ou pas suffisamment : aide au repas, rangement, surveillance, accompagnement ou même des tâches de soin de base (habillement, transferts, voire changes).
Il est d’ailleurs particulièrement instructif de constater que les établissements pratiquants les tarifs les plus élevés au niveau national sont ceux où le taux d’aidants « dames de compagnie » embauchées par des familles y est le plus important.
Le travail de ces dames de compagnie et ou des familles elles-mêmes est concret et peut être quantitativement très important selon les établissements.
Officiellement, les établissements n’en aurait pas besoin et se disent capables d’assumer l’ensemble du service.
Implicitement pourtant c’est autant de travail, gratuit pour l’entreprise,que les établissements n’ont donc pas à fournir autrement et nous estimons que cela constitue pour l’entreprise une économie bienvenue équivalente dans certains EHPAD à plusieurs postes à temps plein.
En coulisses et loin des familles, certains responsables reconnaissent d’ailleurs la valeur de cet apport et concèdent même que le service habituel (aides au repas des résidents dépendants notamment) ne serait pas le même sans le concours de ces dames de compagnies ou en tant cas sans un.concours aussi important.
Dans la pratique quotidienne pourtant, les relations entre familles, responsables et salariés ne sont pas toujours évidentes quant au service attendu et aux tâches associées.
La famille qui tient souvent le « rôle » , concret ou potentiel, de premier contrôleur et premier réclamant ou plaignant, verra souvent, pour un manque signalé, le tort imputé à tel ou tel salarié, tel ou tel service, tel ou tel imprévu ou aléa mais sans que cela ne solutionne les dysfonctionnements soulignés dans la durée.
Bien entendu, un établissement ou l’institution ne se mettra jamais en cause ni ne reconnaîtra ouvertement les manques de moyens, de personnel ou de formation de son personnel. Ce que nous percevons au niveau national comme une manière de se déresponsabiliser et comme l’un des principaux obstacles au progrès social dans le secteur.
Difficile en effet de résoudre des problèmes de fond si l’origine est niée.
Nous avons peu d’espoir que le projet de loi d’adaptation de la société au vieillissementde la population change la done si les principaux concernés ne fassent entendre leurs voix.
Nous n’avons jamais cessé de voir un lien concret entre les attentes des clients et les besoins des salariés.
Actuellement pourtant la réalité ne va selon nous pas plus dans le sens des uns que dans celui des autres et seules les entreprises gestionnaires sortent vraiment gagnantes.
Le cercle est vicieux et c’est pourquoi SUD Santé Sociaux et l’Union Syndicale Solidaires comptent bien user de leur droit à empêcher de tourner en rond.